Jean-Marie Le Pen a rejoint ses aïeux et par là aussi les nôtres, ceux que partagent tous les Français de sang à condition de remonter assez haut. Ce fier Breton, ce grand Français, a bien mérité de la patrie. Armé d’un courage indomptable, animé d’une foi ardente dans la nation, il s’est levé contre l’immigration et la décadence. Les ennemis de la France et de la civilisation ne le lui ont pas pardonné. Jean-Marie Le Pen fut le héros de la France française. Requiescat in pace et in gloria !
J’ai fait une émission exceptionnelle à Radio Athéna (chaîne YouTube) le vendredi 10 janvier 2025, trois jours après sa mort, avec Martin Peltier pour rendre hommage à Jean-Marie Le Pen. Nous avons dessiné le tableau d’une vie aussi longue que riche en événements et en engagements, telle qu’il l’a lui-même racontée dans les deux tomes de ses passionnants mémoires. Nous avons insisté sur sa dimension d’homme d’État.
Jean-Marie Le Pen avait au plus haut point les six qualités nécessaires pour réussir en politique. Il avait le don de la parole : il était mieux qu’un « tribun du peuple », titre trop modeste du second tome de ses mémoires, il était un orateur prodigieux, qui n’avait pas son égal dans le monde politique. Il avait une mémoire fabuleuse. Il avait une santé de fer ; elle lui a permis de vivre jusqu’à quatre-vingt-seize ans malgré toutes les vicissitudes qu’il avait traversées. Il avait un sens psychologique aigu : il savait juger les hommes. Il avait le sens politique, don très peu répandu. Enfin, bien sûr, il avait une énergie incroyable, une force d’âme inébranlable.
Jean-Marie Le Pen avait une autre qualité remarquable, le courage, physique et moral. Paradoxalement, c’est peut-être cette septième qualité qui l’a empêché d’accéder au pouvoir. Un autre n’aurait pas eu le courage d’affronter le système, de supporter la diabolisation et les outrages, d’une violence inouïe. S’il s’était incliné, s’il s’était soumis à l’oligarchie cosmopolite en adoptant sa doxa, nul doute qu’avec les immenses talents dont il était doté il serait arrivé au niveau le plus élevé. Il aurait très probablement été élu président de la république.
Jean-Marie Le Pen n’a pas réussi à prendre le pouvoir, mais il restera un exemple pour les Français qui aiment la France et qui, après lui, trouveront dans son épopée française l’inspiration pour combattre les forces du mal jusqu’à la victoire.
Si l’on doit dire toute l’admiration que l’on a pour le personnage, qui laissera une trace glorieuse dans l’histoire de France, il n’est pas interdit de porter un regard critique sur l’action politique de Jean-Marie Le Pen. Elle n’a pas brillé par sa cohérence et elle a connu un triple échec : dans la contestation du pouvoir gaulliste, dans l’élection à la présidence de la république, enfin dans la succession à la tête de son parti.
Élu député en 1956 à vingt-sept ans sous les couleurs du parti de Pierre Poujade, Jean-Marie Le Pen s’est engagé ardemment pour l’Algérie française et n’a jamais renié cet engagement de jeunesse. Or, cette cause était en réalité indéfendable et perdue d’avance. L’Algérie était à la France, elle n’était pas la France. La première raison évidente, avant même de prendre en compte les différences ethniques, était géographique : entre la France et l’Algérie, il y avait la mer Méditerranée. Or, la nation est une communauté de destin historique constituée par les liens du sang autour d’une ethnie prépondérante sur un territoire continu. Ce critère de continuité territoriale est décisif. Les États-Unis naissants, l’Australie et la Nouvelle-Zélande étaient plus proches ethniquement de l’Angleterre que ne l’étaient et que ne le sont l’Écosse et même le Pays de Galles, et pourtant ils ont tous les trois voulu être indépendants.
De surcroît, même si les Algériens musulmans ou juifs avaient occupé la Provence, ils n’en seraient pas devenus vraiment français pour autant. Les Juifs d’Algérie ont reçu la nationalité française en 1870, les musulmans en 1947, mais c’étaient des Français de papier. Lorsque Jean-Marie Le Pen proclame, à la tribune de l’assemblée nationale, en 1958, que les musulmans d’Algérie sont des Français à part entière, des Français comme les autres, il énonce une énorme sottise. Toute l’histoire se dresse contre ce genre d’illusion. L’islam et le judaïsme sont des religions isomorphes ; l’islam est un judaïsme universaliste, le judaïsme est un islam raciste. Ce sont deux religions orientales incompatibles avec la civilisation occidentale à laquelle la France appartient. Nul ne peut être pieux musulman ou pieux juif et vraiment français.
Il est de fait que la grande majorité des musulmans algériens ne voulaient pas être français. De même, la grande majorité des Français de sang ne voulaient pas qu’ils le fussent. Il est effarant que tant de nationalistes ardents et sincères aient donné dans le mythe de l’Algérie française. On peut affirmer qu’ils se faisaient une idée radicalement fausse de l’essence de la nation française et que donc leur nationalisme était dévoyé.
On peut certes critiquer la façon calamiteuse dont de Gaulle a abandonné l’Algérie, mais c’est lui qui était le vrai nationaliste. Le grand démographe Alfred Sauvy se flattait d’avoir convaincu de Gaulle de le faire en lui montrant les projections démographiques. De Gaulle ne voulait pas que Colombey-les-deux-églises devînt « Colombey-les-deux-mosquées ». La population de l’Algérie a atteint 46.700.000 habitants en 2024, avec un indice de fécondité de 2,8 enfants par femme. La population de la France était de 68.400.000 habitants en 2023… dont une bonne part d’immigrés musulmans, et l’indice de fécondité était de 1,62 enfants par femme. Dans une uchronie où l’Algérie serait restée française, on voit que les musulmans ne seraient pas loin d’être majoritaires et qu’ils le deviendraient forcément dans quelques années. Un nationaliste conséquent ne pouvait pas vouloir cela.
Si Jean-Marie Le Pen n’était pas vraiment nationaliste, il n’était pas non plus raciste, ni dans le bon sens ni dans le mauvais sens du terme. Ni dans le mauvais sens : il n’éprouvait aucune haine à l’égard des autres races. Ni dans le bon sens : sa conscience de race était déficiente. Il n’aurait pas pu tenir ces propos du général de Gaulle, souvent cités et qui sont frappés au coin du bon sens :
« C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité ! Sinon, la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. »
Il y avait au fond une parfaite incohérence dans l’action politique de Jean-Marie Le Pen entre son combat contre de Gaulle et pour l’Algérie française, d’une part, son combat contre l’immigration, d’autre part. Si les musulmans pouvaient être « intégrés » à la nation française en Algérie, on se demande bien pourquoi ils ne pouvaient pas l’être en France…
Jean-Marie Le Pen a dirigé la campagne de Jean-Louis Tixier-Vignancour à l’élection présidentielle de 1965. Ce fut un échec, mais la responsabilité en revint au candidat lui-même. Allons tout de suite à l’essentiel : la création du Front national en 1972 et l’essor de ce parti, qui se fit attendre jusqu’aux élections européennes de 1984. La proportionnelle a permis au parti d’émerger en faisant élire des députés européens. Ce résultat inattendu faisait suite à l’invitation de Le Pen à « L’heure de vérité », émission phare d’Antenne 2 dirigée par François-Henri de Virieu. Par son talent oratoire, le président du FN avait « crevé l’écran ». Ce fut un tournant non seulement pour le parti, mais pour la vie politique française. Le FN s’est imposé ensuite dans le paysage politique, écarté de l’assemblée nationale par le scrutin uninominal à deux tours, sauf en 1986, grâce au retour passager de la proportionnelle, mais il a eu des conseillers régionaux.
Jean-Marie Le Pen s’est présenté cinq fois à l’élection présidentielle. En 2002, il a accédé miraculeusement au second tour, avec seulement 16% des voix, à cause de la dispersion des candidatures à gauche qui avait provoqué l’élimination de Lionel Jospin. On a assisté alors, pendant les quinze jours de l’entre-deux-tours, à une hyperbolique campagne de haine contre le candidat dit « d’extrême droite », qui a été écrasé au second tour par Jacques Chirac. En 2007, candidat pour la dernière fois à la présidentielle, Le Pen a fait une mauvaise campagne. Pour prendre le contre-pied de Nicolas Sarkozy, qui avait dénoncé les « racailles » des banlieues, Le Pen avait cru intelligent d’aller faire un discours pour tendre la main aux jeunes immigrés en leur assurant qu’il les tenait pour des Français comme les autres et, mieux encore, pour l’avenir de la France, cela sur la même dalle d’Argenteuil où Sarkozy avait tenu ces propos. Cette résurgence de ses convictions bien ancrées de partisan de l’Algérie français ne lui a pas porté chance. Évidemment, elle ne lui a pas donné une seule voix des musulmans ; par contre, elle a dégoûté ses partisans, qui se sont réfugiés dans l’abstention, et il a fini à 10%.
On mesure ici la faiblesse de la stratégie du « Menhir ». Il a su, par la magie de son verbe, son charisme et ses talents d’organisateur, en s’appuyant sur le rejet de la submersion migratoire par des Français de plus en plus nombreux, faire du FN de 1972, qui n’était à l’origine qu’un groupuscule classé à « l’extrême droite », un grand parti, qui a attiré des millions d’électeurs – mais pour quel résultat ? Non seulement le FN, sous sa direction, n’est pas arrivé au pouvoir, n’a même pas participé au pouvoir en raison du refus de l’union de la droite proclamé par Jacques Chirac, mais, parti d’opposition, il n’a exercé aucune influence sur la politique française, notamment en matière d’immigration. François Mitterrand avait donné un coup de pouce à Le Pen en le faisant inviter à « L’heure de vérité », mais, simultanément, Mitterrand a lancé SOS-Racisme, de telle sorte que les Français baignent depuis lors dans les délires de la propagande antiraciste, instrument de l’idéologie cosmopolite.
On a beaucoup reproché à Le Pen ses maladresses et ses provocations. C’était injuste. L’ennemi savait produire de la diabolisation à partir de rien, comme on l’a vu par exemple dans l’affaire du cimetière de Carpentras. L’erreur stratégique de Le Pen était autre. Il ne s’est jamais placé en stratégie haute, en invoquant des principes auxquels sont attachés la grande majorité des Français. On lui opposait un prétendu « front républicain ». On ne lui a jamais entendu dire : « C’est moi qui suis républicain puisque je défends la liberté d’opinion et l’identité nationale, alors que vous, vous muselez les Français et vous livrez la France à l’étranger. » Le Pen était presque toujours en stratégie basse, avec des formules qui alimentaient l’ostracisme qu’il subissait, parfois en stratégie diagonale, comme on l’a vu pour la dalle d’Argenteuil, jamais en stratégie haute. L’échec a donc été total. Les succès électoraux incontestables n’ont finalement servi à rien.
Enfin, l’échec sans doute irrémédiable, c’est celui de sa succession à la tête du Front national, renommé Rassemblement national. Échec dont il a pâti personnellement en se faisant éliminer par sa propre fille du parti qu’il avait créé et dirigé pendant quarante ans. L’esprit de famille est une belle chose, mais le népotisme dont Jean-Marie a fait preuve en adoubant sa fille Marine pour lui succéder a été calamiteux. Certes, Marine Le Pen avait un talent politique incontestable et elle a largement augmenté l’électorat du parti en lissant son image. Son père ne pouvait cependant pas ignorer que les convictions de sa fille étaient fort différentes des siennes et même souvent à l’opposé. Honnêtement, on ne peut pas prendre Marine au sérieux quand elle se dit hostile à l’immigration. Elle a déclaré que le grand remplacement était « une théorie complotiste »… Elle ne demande ni l’abrogation de la législation antiraciste au nom de la liberté d’opinion ni la dénonciation de la convention européenne des droits de l’homme au nom de la souveraineté nationale ni aucune des réformes indispensables à l’arrêt de la submersion migratoire. Elle a rompu avec le parti allemand de droite nationale, l’AfD, parce que celui-ci s’était prononcé pour la réémigration. Marine Le Pen ne voulant pas entendre parler de réémigration, cela signifie qu’elle veut garder tous les immigrés et, comme elle n’a pas l’intention de changer quoi que ce soit au carcan juridique qui empêche d’arrêter l’immigration, il n’y a en vérité rien dans son programme qui fasse réellement la différence avec celui de la gauche. N’oublions pas non plus que ce triste personnage, conjointement avec son compère Jordan Bardella, immigré d’origine italienne et maghrébine qu’elle a propulsé à la tête du parti pour se réserver le groupe de députés, a rendu hommage à Badinter et à Manouchian, et que, dans le même mois de janvier 2024, elle a voté l’inscription de l’avortement dans la constitution.
La stratégie diagonale de dédiabolisation a eu des résultats positifs pour le parti jusqu’à un certain point, mais elle a atteint ses limites le 7 juillet 2024 quand, au second tour des élections législatives, le prétendu « front républicain » a mis fin aux espérances de Marine Le Pen. Croyez-vous qu’elle a eu l’intelligence d’en tirer la leçon ? Point du tout. On ne change pas une stratégie qui perd… Marine Le Pen n’a tout simplement pas l’intelligence de comprendre qu’elle devrait passer en stratégie haute. Ce serait, il est vrai, aller contre ses convictions… Il est donc fort improbable qu’elle arrive jamais au pouvoir et il est tout à fait certain que, si par extraordinaire elle y parvenait, elle ne ferait rien de bon pour la France.
La mort de Jean-Marie Le Pen a eu lieu le 7 janvier 2025, quelques jours seulement avant l’intronisation du nouveau président des États-Unis, Donald Trump, le 20 janvier 2025. Cette quasi-coïncidence de dates est symbolique. Donald Trump a gagné en stratégie haute : « Make America great again ! » (Rendez sa grandeur à l’Amérique !), en dénonçant au nom de cette exigence de grandeur ses ennemis de gauche, membres ou soutiens du parti démocrate. Jean-Marie Le Pen n’a jamais compris ce qu’il devait faire. Par exemple, dans l’entre-deux-tours de la présidentielle de 2002, qui fut pourtant son moment de gloire, il a vasouillé en déclarant : « Je suis économiquement de droite, socialement de gauche, nationalement français »… au lieu de dénoncer son adversaire, Jacques Chirac, comme un faux homme de droite, complice et otage de la gauche. Un candaule.
Nous devons admirer Jean-Marie Le Pen pour son courage, mais il ne faut pas avoir le complexe de Camerone, il faut préférer la gloire des vainqueurs à celle des vaincus. Méditons les leçons de son triple échec. La France aurait besoin d’un homme providentiel à la Donald Trump pour sortir de la décadence et détrôner l’oligarchie cosmopolite. S’il existe, c’est à lui de se manifester…
Henry de Lesquen
Son erreur aura été de refuser la stratégie électorale que préconisait Bruno Mégret. La stratégie de Mégret consistait à faire des alliances opportuniste avec les autres parti de droite lors des élections municipales afin d'avoir le plus de maires de droite et d'extrême-droite partout en France. Le Menhir a refusé, puis il a viré Mégret et ses partisans.
Sauf que si l'Algérie était devenue française ou "à la France", la démographie algerienne aurait connu une transition démographique plus rapide (et non une transition qui s'éternise anormalement... ) donc la population musulmane serait moins forte de nos jours.. probablement plusieurs millions en moins. De Gaulle n y connaissait rien en démographie, il avait donc tort.
De deux, la croissance économique de l'Algerie sous giron française étant plus forte, elle aurait été plus dynamique que la metropole (grâce au petrole bien géré et au tourisme de masse, l'Algérie avait tous les atouts naturels pour réussir) et donc l'immigration se serait faite de la France vers l'Algérie et non l'inverse. Cf ce qu'on pû dire certains économistes sur ce sujet. L'Algérie…
Coquille : "La population de l’Algérie a atteint 46.700.000 habitants en 2024"
Il manque un "d'" avant habitants
Je partage votre analyse mais que signifie le complexe de Camerone?
Il n'existe pas, car cette bataille est d'abord le symbole de la mission remplie (le convoi est passé sans encombre), et le serment de fidélité à Danjou, tenu.
C'est évidemment la double raison pour laquelle cette bataille est exemplaire.
Camerone est présentée souvent à tord comme une défaite, ce qui est complètement faux d'autant plus que les 60 légionnaires ont causé aux mexicains des pertes considérables, 5 fois plus àque leur modeste effectif.
Excellent article et analyse hautement lucide ! Si l'on vise "haut", on peut y arriver. Pas de "combinaisons", de vision technique, de gestion, de réponses lisses, il faut invoquer les "mânes".
L'air des sommets est pur et ces derniers sont peu encombrés (cf le Gnal de Gaulle) : les Français attendent en effet un discours puissant, élevé et qui répondent à leurs attentes (la politicaillerie ne peut rien) : le mythe du sauveur, certes, mais existe-t-il ?
Il faut avoir la France, la civilisation européenne, et en particulier gréco-romaine, chevillées au corps, au coeur et à l'esprit pour avancer ; et y croire encore un peu...
Est-ce encore possible ? Il ne faut certes pas céder au désespoir, mais tous…