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  • Photo du rédacteurHenry de Lesquen

Le droit contre la loi, les juges contre le peuple

Le droit contre la loi, les juges contre le peuple :

Pour en finir avec le prétendu État de droit, revenir à l’État légal


I. Perversité du prétendu « État de droit »

 

1. La cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné la Suisse le 9 avril 2024 pour « inaction climatique ». On ne discutera pas ici du fond du sujet, bien que ce soit une circonstance aggravante – la théorie selon laquelle l’homme serait responsable d’un réchauffement climatique réel ou prétendu (tout dépend de la période de référence) n’a aucun fondement scientifique sérieux –, mais du fait qu’un tribunal, qui plus est étranger et anational, s’arroge le droit de dicter à un État la politique qu’il doit conduire dans ce domaine. Il est révélateur que, pour rendre cette décision, la cour ait interprété de façon malhonnête l’article 8 de la convention européenne des droits de l’homme relatif au respect de la vie privée et familiale, qui n’était évidemment pas conçu pour traiter du climat. Étendre les « droits de l’homme » au climat, il fallait le faire ! La CEDH, c’est Ubu roi.

Comme l’écrit Laurence de Charette dans un excellent article du Figaro (19 avril 2024) : « Il se trouve que la convention européenne des droits de l’homme ne dit – comme son nom le laisse supposer – évidemment pas un mot de l’environnement, mais les juges strasbourgeois ont une nouvelle fois fait preuve de leur inventivité magistrale, parvenant à faire dire à l’article 8, qui proclame “le droit au respect de la vie privée et familiale”, qu’il consacrait “un droit à une protection effective, par les autorités de l’État, contre les effets néfastes graves du changement climatique sur la vie, la santé, le bien-être et la qualité de vie” ». Elle ajoute que cette décision aberrante va conduire à une multiplication des actions en justice « toujours au nom, pêle-mêle, du droit à la “vie”, ou à la “vie privée”, de “l’interdiction des traitements inhumains“ ou de la “discrimination”, toutes notions que les juges européens ont étirées sans fin et ouvertes à tous les vents “progressistes” et gauchisants », autrement dit cosmopolites.

Dans leur outrecuidance, les juges de la CEDH nous ont habitués à tordre les textes pour étendre indéfiniment leurs prérogatives. La CEDH est ce que l’on fait de pire en la matière. Institution anationale peuplée d’affidés de la fondation de la société ouverte de George Soros et de son fils Alexander, elle est cosmopolite de part en part.

En l’espèce, la cour est allée très loin dans l’abus de pouvoir. Elle n’a pas annulé une décision prise par l’État suisse, elle a ordonné à celui-ci de mener une politique dont elle a défini le cadre : il doit se doter d’un calendrier pour parvenir à la « neutralité carbone », avec des objectifs intermédiaires. Ce jugement est au fond ridicule, d’ailleurs, quand on songe que la contribution de la Suisse aux émissions de gaz à effet de serre sur la planète est minuscule. Mais la CEDH n’a pas d’autorité sur les États-Unis, la Chine ou l’Inde, gros émetteurs de gaz carbonique…

On comprend que l’UDC (Union démocratique du centre), parti national-libéral de droite modérée – et non d’extrême comme le disent les media cosmopolites, dont Le Monde (11 avril 2024) – , premier parti de Suisse, ait déclaré : « L’UDC condamne fermement cette ingérence effrontée de juges étrangers et demande que la Suisse quitte le Conseil de l’Europe [et donc la convention européenne des droits de l’homme]. »

La convention européenne des droits de l’homme soumet la France à la jurisprudence cosmopolite de la CEDH. Celle-ci nous interdirait, par exemple, de mettre fin au regroupement familial. Elle nous a contraints à rapatrier de Syrie les femmes djihadistes avec leurs enfants – lesquels, ayant profité de l’excellent éducation que leur ont donnée leurs parents, ne manqueront pas, devenus grands et en état de porter les armes, d’en faire l’usage que l’on devine…

 

2. Dans l’ordre interne, notre conseil constitutionnel est à peine moins pervers que la CEDH. Il s’est déconsidéré définitivement en 2018 quand il a invoqué le principe de fraternité pour restreindre le champ du délit d’aide à l’entrée des immigrés illégaux. Il a ainsi absous cette canaille de Cédric Herrou, complice des envahisseurs, qui les avait aidés à nous envahir. Le scandale était grand, car la fraternité est un principe qui doit unir les membres de la nation et qui ne saurait s’appliquer à des étrangers, a fortiori quand ils violent la loi républicaine pour nous envahir.

Dans une autre décision, le même conseil constitutionnel avait annulé la loi française sur l’indemnisation des victimes de la guerre d’Algérie en ce qu’elle réservait cette indemnisation aux Français, laissant l’État algérien s’occuper de ses nationaux. Le conseil constitutionnel a estimé que cette discrimination était contraire aux principes constitutionnels. Or, la discrimination entre Français et étrangers, ou préférence nationale, est un principe essentiel à la république. À cet égard, la loi Pleven du 1er juillet 1972, qui l’a rendue illégale pour les particuliers, a aboli la république pour établir l’État cosmopolite à la place. Pour autant, cette loi scélérate ne pouvait invalider celle qui traitait de l’indemnisation des victimes de la guerre d’Algérie.

 

Le conseil constitutionnel, présidé, rappelons-le, par Laurent Fabius, ancien premier ministre de François Mitterrand, a annulé les deux tiers de la loi sur l’immigration votée par le parlement, où il n’y avait pourtant pas grand-chose, et il a rejeté la demande de référendum présentée le 13 mars 2024 par les présidents des groupes parlementaires du parti LR, Olivier Marleix et Bruno Retailleau. Ce dernier a déclaré à ce propos : « À nouveau, le conseil constitutionnel interprète à sa façon la constitution. » Observant un « parfait alignement » entre Emmanuel Macron et les membres du conseil constitutionnel, il a ajouté : « Une politique progressiste [c’est-à-dire cosmopolite] d’ouverture à l’immigration, voilà leur objectif commun. »

 

3. Cet arrêt de la cour européenne des droits de l’homme et ces décisions du conseil constitutionnel sont des exemples emblématiques de la perversité du prétendu État de droit. L’expression est une traduction servile de l’allemand Rechtsstaat. Elle a été en effet élaborée au XIXe siècle par des jurisconsultes allemands dans la pieuse intention de défendre la liberté individuelle contre les atteintes d’un État autoritaire, celui de la Prusse, puis celui de l’Allemagne unifiée après 1870. Tant que les juges se bornent à annuler des décisions individuelles prises par le pouvoir exécutif, cela n’est pas contestable dans son principe. Mais avec Hans Kelsen (1881-1973), auteur d’une funeste Théorie pure du droit (1934) qui constitue depuis les tables de la loi des hautes juridictions, le concept de l’État de droit a été dévoyé.

Le paradoxe, c’est que Kelsen, pour sa part, rejetait l’expression à juste titre. Comme il l’admettait, tout État est un État de droit. Il n’y pas de droit sans État ni d’État sans droit. Un État collectiviste comme l’était l’URSS ou comme le sont aujourd’hui la Chine et la Corée du nord, produit davantage de droit qu’un État plus ou moins libéral comme la France, bien qu’il s’agisse dans ce cas du droit administratif plutôt que du droit privé.

Depuis Kelsen, en s’appuyant sur sa « théorie pure du droit », on a fait de l’État de droit une formule apologétique pour désigner le gouvernement des juges ou, plus précisément, un État où les juges s’arrogent le pouvoir de censurer la loi au nom du droit, tel qu’ils l’entendent, en vertu de principes supérieurs qu’ils inventent librement selon leur idéologie – souvent, en France, en prétendant s’appuyer sur la « tradition républicaine », alors que celle-ci est en réalité fondée sur la préférence nationale et qu’elle est donc essentiellement anticosmopolite. Ghislain Benhessa en a fait une analyse remarquable dans son livre de 2021, Le totem de l'État de droit : concept flou et conséquences claires, bien qu’il ait reculé devant la conclusion logique : il faut abolir l’État de droit. Kelsen soutenait qu’il y avait une hiérarchie des normes et donc, au sommet de la pyramide, des normes suprêmes qui étaient au dessus des lois. C’est à lui notamment que l’on doit la création d’un conseil constitutionnel à l’avènement de la Ve république et le contrôle de la constitutionnalité des lois. À vrai dire, si la pensée de Kelsen a inspiré dès le départ, dans son intégralité, la cour constitutionnelle autrichienne, ainsi que d’autres juridictions constitutionnelles des pays voisins de la France, notre conseil constitutionnel n’était pour les rédacteurs de la constitution de 1958 qu’un « chien de garde du parlementarisme rationalisé », selon l’expression consacrée. Mais il s’est attribué le même rôle que ses homologues européens avec sa décision « Liberté d’association » de 1971.

Nous aurions pu ajouter à notre article sur « les dix crimes de Georges Pompidou » un onzième crime : le président de la république en fonction en 1971 n’a pas réagi à une décision scandaleuse du conseil constitutionnel qui était une usurpation de pouvoir et qui n’était évidemment qu’un début, comme l’ont immédiatement compris les meilleurs juristes, qui connaissaient la doctrine de Kelsen et mesuraient ses conséquences.  Il était loisible à Georges Pompidou de demander au peuple ou au parlement de réformer la constitution pour remettre le conseil constitutionnel à sa place. Il ne l’a pas fait et ce fut une faute impardonnable, qui s’ajouta aux dix que nous avons déjà analysées dans notre précédent article. Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres de la responsabilité des hommes politiques dans la dérive qui a conduit à l’État de droit, à l’abolition de l’État légal et de la démocratie. Les juges n’ont pris le pouvoir que parce qu’on le leur a donné ou qu’on les a laissés le prendre. Après la mort de Pompidou, c’est Alain Poher, président de la république par intérim, qui a signé la convention européenne des droits de l’homme en 1974 et ce sont ses successeurs, Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand, qui ont donné à tout un chacun le droit d’ester en justice auprès de la CEDH. Bien entendu, après ceux-ci, aucun des présidents n’a voulu dénoncer la convention. Les présidents, gouvernements, ministres des affaires étrangères, les majorités parlementaires, n’ont cessé depuis des décennies de négocier, signer et ratifier une foultitude de traités devenus supra-législatifs. Honte à eux ! Ils ont trahi les intérêts de la nation en portant atteinte à sa souveraineté.

On voit toute l’ambiguïté du contrôle de la constitutionnalité des lois, qui a fonctionné comme un piège à attraper la démocratie. En effet, s’il paraît normal que les parlementaires, représentants du peuple dans un État dit démocratique, puissent être censurés s’ils violent la constitution, laquelle exprime la volonté du peuple, rien n’empêche les juges constitutionnels d’interpréter la constitution à leur guise, et le fait est qu’ils ne s’en privent pas, sans que le peuple ait son mot à dire, en sorte que l’on aboutit à l’inverse du but légitime : au lieu de faire prévaloir la volonté du peuple, c’est un quarteron de magistrats irresponsables qui a le dernier mot. Mais les juges n’ont même pas besoin de tordre l’interprétation de la constitution, comme l’a fait la CEDH pour l’article 8 de la convention européenne des droits de l’homme, ils trouvent dans la doctrine de Kelsen la faculté, ou plutôt le devoir, de « découvrir » des principes non écrits qui seraient la norme suprême et qu’ils doivent imposer au peuple à travers ses représentants en censurant les lois que ceux-ci ont votées.

Ainsi conçu, l’État de droit est le contraire de l’État légal et il constitue un déni de démocratie.

 

II. Restauration de l’État légal

 

1. Jacques Krynen a montré dans son beau livre sur L’État de justice que l’État de droit que nous subissons aujourd’hui était en quelque sorte la revanche des parlements de l’Ancien Régime, que le roi tenait en échec en faisant des « lits de justice » et qui ont été supprimés en 1789. On sait que ces parlements, qui étaient des tribunaux et n’avaient donc rien à voir avec le parlement anglais et le parlement français actuel, composé de représentants élus par le peuple (au suffrage indirect pour le sénat, ce qui est au demeurant contestable), défendaient effectivement les libertés et franchises des Français contre les abus de pouvoir du roi en s’appuyant sur les traditions ou même en se réclamant de la souveraineté du peuple face au monarque, qui avait hérité du trône et n’avait pas été plus élu que les parlementaires. Les anciens parlements, bien qu’ils fussent par rapport aux pouvoirs exécutif ou législatif à peu près dans la même relation que nos juges actuels – si ce n’est que ceux-ci ne sont pas sommés d’obtempérer par des lits de justice… – n’avaient pas d’idées cosmopolites et ne s’appuyaient nullement sur une théorie abstraite des « droits de l’homme ».

Nous reprendrons ici certaines analyses que nous avons exposées dans notre éditorial de décembre 2023 au sujet de l’immigration. Par le décret des 16 et 24 août 1790 sur l’organisation judiciaire, la constituante a instauré l’État légal en interdisant aux magistrats de violer la loi en jugeant contra legem (contre la loi en latin). L’article 10 est ainsi rédigé :

« Les tribunaux ne pourront prendre directement ou indirectement aucune part à l’exercice du pouvoir législatif ni empêcher ou suspendre l’exécution des décrets du Corps législatif, sanctionnés par le Roi, à peine de forfaiture. »

Adrien Duport (1759-1798), député à l’assemblée constituante, a bien résumé cette conception de la justice subordonnée à la loi en affirmant que le jugement était la conclusion d’un syllogisme dont la mineure était le fait et dont la majeure était la loi. Par exemple, si on nous pardonne cet anachronisme : Landru est un assassin (mineure, le fait) ; un assassin est passible de la peine de mort (majeure, la loi) ; donc Landru est condamné à mort (conclusion, le jugement).

Comme quoi l’horrible révolution de 1789 a eu des aspects positifs, au moins à ses débuts – à ceci près quand même que l’État révolutionnaire n’avait rien de démocratique en réalité, qu’il était né de la terreur avant que la tyrannie jacobine n’en fît un principe de gouvernement. Mais l’État légal a été nécessaire à la démocratie et à la république lorsque celles-ci ont été instituées en 1848, puis en 1871 (de facto). Bien que la France ne soit plus qu’une pseudo-démocratie, l’État légal limiterait les dégâts puisque la magistrature est bien plus cosmopolite que ne le sont en pratique les élus censés représenter le peuple, qui ont quand même des comptes à rendre périodiquement à celui-ci.

Le prétendu « État de droit » est contraire à l'État légal parce qu'il établit la supériorité du juge sur le législateur. Par conséquent, il est contraire à la démocratie. Pour en finir avec l’État de droit et restaurer l’Étal légal, on intégrera à la constitution l’article 10 du décret des 16 et 24 août 1790 en l'actualisant. En effet, ce décret, jamais abrogé, est tombé en désuétude et n'est plus appliqué depuis belle lurette. Il faut donc le constitutionnaliser. Cela donnera cette addition à l'article 64 :

« Les tribunaux ne peuvent prendre directement ou indirectement aucune part à l'exercice du pouvoir législatif ni empêcher ou suspendre l'exécution des lois, à peine de forfaiture. »

Encore faudra-t-il rétablir le crime de forfaiture, qui a été éliminé du code pénal en 1994.

 

2. Il faudra mettre au pas le conseil constitutionnel. Pour qu’il n’ait pas le dernier mot, ses décisions pourront être cassées et réformées à l’initiative du président de la république par un vote conforme des deux assemblées ou par référendum. De plus, le conseil constitutionnel ne pourra plus bloquer en les déclarant contraires à la constitution les propositions de loi que le président de la république entendra soumettre au référendum en application de l’article 11, il donnera simplement un avis.

Les membres du conseil constitutionnel sont actuellement nommés par le président de la république et les présidents des deux assemblées. Ce n’est pas satisfaisant. Ils seront élus directement par le peuple. À cet effet, la France sera partagée en neuf circonscriptions, qui en éliront chacune un membre au suffrage universel.

 

3. Il est impératif de dénoncer la convention européenne des droits de l’homme, qui soumet la France, nous l’avons vu, à la jurisprudence cosmopolite de la CEDH. Plus généralement, la loi française votée par le parlement ou directement par le peuple par voie de référendum doit l’emporter dans tous les cas sur tout traité antérieur, y compris celui de l’union européenne et donc le droit qui en dérive sous forme de règlements et de directives, en sorte que les juges ne puissent plus invoquer les traités pour mettre la loi en échec. L’article 55 de la constitution doit donc être purement et simplement inversé. Il est ainsi rédigé actuellement :

« Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie. »

Il sera ainsi réécrit :

« La loi a une autorité supérieure à celle des traités ou accords ratifiés ou approuvés antérieurement. Pour l’interprétation des traités ou accords, les tribunaux s’en remettent au ministre des affaires étrangères, seul compétent en la matière. »

Et encore, pour en finir avec l’effet direct des règlements européens imposés par la jurisprudence de la cour de justice de l’union européenne :

« Les normes et décisions étrangères ne sont applicables en France qu’après qu’un arrêté du ministre des affaires étrangères les a rendues effectives. »

Cela ne signifiera pas que la loi française ne sera pas en général, et même presque toujours, en parfaite conformité avec les traités que nous aurons ratifiés, mais seulement qu’elle ne sera plus liée par eux d’une manière absolue. De plus, les tribunaux ne pourront plus juger contra legem en invoquant les traités.

Il conviendra aussi de supprimer la référence au calamiteux préambule de la constitution de la IVe république du 27 octobre 1946, qui dispose notamment :

« La République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international… Sous réserve de réciprocité, la France consent aux limitations de souveraineté nécessaires à l’organisation et à la défense de la paix. »

La France aura alors réalisé un « Frexit juridique » en ce sens que, sans quitter l’union européenne, elle aura mis en échec les empiétements de celle-ci, dont les juges français se sont faits les complices, sur ses compétences souveraines. Il est du reste probable que les tensions politiques qui en résulteront provoqueront une crise et que celle-ci aboutira à un « Frexit » pur et simple, à la sortie de l’union européenne, objectif éminemment souhaitable.

 

Remarque : nous remercions Auguste Lorrain de ses excellentes observations sur la première version de l’article.

 

Henry de Lesquen

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